Valorisation de la littérature par l’invitation d’auteurs en résidence, entretiens, lectures à hautes voix, lectures musicales et ateliers…

À la rencontre de Fanny Taillandier

Romancière et urbaniste, Fanny Taillandier travaille, livre après livre, à un ensemble de textes qu’elle nomme Empires. Elle écrit sur le rapport des êtres humains avec leur espace, leur géographie, leur territoire, qui, pour elle sont des liens politiques.

Lecture d’extraits 
par Jean-Marc Fort

J’imagine Empires comme un cycle ouvert qui ne contiendra pas que des romans. Ce qui m’intéresse au contraire, c’est d’user de multiples formes d’écriture (fiction, documentaire…) pour creuser cette question : qu’est-ce qui fait, dans l’histoire humaine, que des puissances s’étendent, deviennent impérialistes, unifient un territoire, puis disparaissent ? Comment ce mécanisme, celui des empires, se traduit-il humainement ? Dans des crises, des confrontations, des soulèvements ; mais aussi plus simplement dans des façons d’habiter, des récits communs, des croyances. Cela peut être à très grande échelle, mais aussi presque intime, comme on parle de l’empire d’une émotion. Cela a à voir avec l’imaginaire autant qu’avec le territoire. FT

Fanny Taillandier a publié Farouches aux éditions du Seuil (2021), son quatrième roman inscrit dans le  cycle Empires.

Situé dans le décor fictif d’une Ligurie devenue indépendante dans une Europe des régions, Farouches suit l’histoire d’un couple retranché dans le luxe sobre de la Méditerranée tandis que plusieurs évènements viennent menacer leur confort et leur tranquillité.

Je me suis amusée avec la géographie européenne. J’ai imaginé un futur proche où les Etats nations ont disparu et où l’Europe est devenue une Union qui dirige des régions transnationales. On est en Ligurie, une région qui va du delta du Rhône à Gènes.

J’avais envie de travailler sur cette notion de menace, qui en est une à partir du moment où on la regarde comme tel. Ce que je trouve intéressant c’est ce caractère précaire des frontières quand on le met en mouvement, on se rend compte que toute frontière est le fait de consensus imaginaire.

Entretien animé par Élodie Karaki

Cette rencontre a eu lieu le vendredi 4 février 2022 à la bibliothèque d’Ansouis

Extrait

   Farouches, Empires II, Seuil, 2021

Paysage de ZAC : lent travelling, à travers la vitre légèrement fumée du quatre-quatre urbain, sur des parkings et des enseignes, avec des accélérations et décélérations progressives entre chaque rond-point. Pas de piétons hormis devant les portes coulissantes de chaque boutique, au loin, de l’autre côté des parkings – silhouettes indistinctes. Ici au milieu, les vivants devenus automobiles, être clignotant, être rétrogradation, être cédez-le-passage.